UN JOUR LOINTAIN … ,

nous allons être confrontés à la question:

Que vont devenir ces cavités souterraines creusées dans le sel quand  EDF délaissera le site de stockage de gaz, dont on ne sait pas aujourd’hui encore, selon EDF, comment il sera acheminé jusqu’au cavités et comment il en ressortira (et vers quelle destination?), car l’acheminement du gaz ne serait pas de leur ressort, nous affirme-t-on (largement discuté lors du débat de Messanges, verbatim page 50, 51, 52)!

Lors du débat public de Seignosse, Monsieur Richez de EDF nous a expliqué:

« Alors, sur la cessation d’activité. Tout d’abord, sachez que dès la phase de création de l’établissement, nous sommes obligés déjà d’indiquer aux autorités quelles seraient les voies envisagées. Sur des cavités salines, typiquement, le Ministère en charge des Mines est effectivement préoccupé de la survie à long terme des ouvrages. Et en termes de comblement, les techniques aujourd’hui qui ont été mises en oeuvre jusqu’à maintenant, visent à venir introduire dans la cavité de la saumure qui va venir, comme cela, assurer la stabilité de l’ouvrage, puisque c’est un fluide incompressible. On va s’assurer, par ailleurs, effectivement, de l’étanchéité. Ce sont les méthodes reconnues, approuvées de cessation d’activité pour les cavités salines. « 

Suite à la question d’un monsieur du public:

« La ville de Dax a tristement expérimenté la fermeture de salines, tout le monde peut aller voir le trou et un immeuble abandonné qui est en arrêté de péril. Cela n’est pas concevable avec les techniques modernes de restauration des sites ? Est-ce qu’il ne va pas y avoir une catastrophe géologique plus tard, même dans 100 ans ? »

La réponse de Monsieur Richez :

« La cessation d’exploitation, de la même façon que la création, sera forcément surveillée, notamment par les autorités. Elle fera l’objet de dépose d’un plan et devra être approuvée. Des mesures de dessus seront mises en oeuvre. Je voudrais quand même vous rappeler qu’on parle d’une cavité qui aurait 50 mètres de diamètre à plus de 1 000 mètres de profondeur. Vu du sol, c’est une petite tête d’épingle ou presque. Et en conséquence, et c’est bien l’intérêt des dômes salins, de ces dômes de sel, c’est qu’ils ont des caractéristiques mécaniques qui font que si vous créez une petite inclusion incompressible à l’intérieur du dôme, et la saumure est un fluide incompressible… si vous voulez, cette petite inclusion incompressible à l’intérieur du dôme de sel, vous ne créerez aucun risque mécanique pour l’ensemble de l’ouvrage, pour l’ensemble du dôme de sel, et donc, pour les constructions en surface.Je connais effectivement les difficultés qui ont été rencontrées à Dax, ce ne sont pas du tout les mêmes profondeurs et, relativement, ce ne sont pas du tout les mêmes tailles d’ouvrage qui étaient concernées. Ce qui explique, et je pense aussi que ce n’est pas forcément les mêmes précautions qui ont été mises en oeuvre, qui explique les dommages importants que, effectivement, et qui existent encore aujourd’hui. »

Suite à ces interventions, on peut se demander si Monsieur Richez oubliait qu’il s’agira de plusieurs cavités de 50m de diamètres ( c’est un peu plus grand qu’ « une tête d’épingle ») et n’ aurait-il pas connaissance des documents officiels et récents de l’INERIS (Institut National de l’Environnement Industriel et des Risques) sur:

L’ABANDON DES CAVITES DE STOCKAGE LESSIVEES DANS LE SEL : STRATEGIES ENVISAGEES POUR LA FERMETURE DES CAVITES ET LA MAITRISE DES ALEAS A LONG TERME .

Dans cette étude sont expliquées précisément, par les spécialistes les plus renommés dans le domaine, les différentes méthodes d’abandon de cavités salines, les risques et dangers et les conséquences éventuelles pour l’environnement et la population.

Réduire la réponse à la question d’un riverain sur un simple: « On vise à remplir la cavité de saumure. » me semble sous-estimer les capaçités intellectuelles du public .

De fait les informations que l’on trouve dans l’étude sont assez faciles à comprendre et l’essence de cette étude peut se réduire à ceci: rien n’est sûr du tout! La sécurité régulièrement mise en avant par les représentants d’EDF existe -t-elle vraiment?

Une autre question qu’on doit se poser est évidemment : D’ ou viendra cette saumure pour remplir  les cavités??? Monsieur Richez nous a expliqué que les saumoducs prévus seront neutralisés et que la station de pompage du littorale devrait être démontée.

Débat de Messanges, verbatim P. 13,14: Grégoire RICHEZ:

« Il n’y a pas de réponse unique. Effectivement, il y a différentes pistes qui sont celles que vous évoquez. Soit un démontage, soit un bouchage, un remplissage par des matériaux inertes.

Aujourd’hui, on n’a pas de schémas strictement arrêtés, cela fera l’objet de discussion à mettre en place, de toute façon qui sont des préalables nécessaires avant d’obtenir les autorisations pour construire ce genre d’ouvrage. Ce sera vraisemblablement une solution mixte qui sera mise en œuvre pour la neutralisation de cet ouvrage, ou encore une fois, c’est si nous ne trouvons pas d’autres débouchés et d’autres réutilisations pour l’eau de mer ou pour la saumure. [...]

Sur le saumoduc, il n’est prévu que deux installations de part et d’autre. Donc, nous aurons une installation de pompage qui sera proche de la zone littorale mais en arrière de la dune; et par ailleurs, une deuxième installation de pompage qui sera, elle, entre Mimbaste et Pouillon, près du site de stockage. Il n’y aura pas d’installation de pompage intermédiaire. Nous aurons à quelques endroits précis des organes, des vannes d’isolement pour pouvoir interrompre le fonctionnement le cas échéant mais il n’y aura pas d’installation, je vais dire, visible depuis l’extérieur en dehors de ces deux stations.Alors, sur la partie littorale, si elle n’a pas d’autre usage, elle sera démontée, oui. »

Une fois de plus, le public est confronté à des contradictions du maître d’ouvrage non-négligeables!

Il est impératif que la population concernée soit informée sur toutes les conséquences et dangers possibles d’un tel projet, afin d’en connaître les réels impacts sur le long terme et ainsi de préserver les générations futures des éventuelles conséquences néfastes.

Pour illustrer l’ampleur de la problématique, un exemple allemand nous montre que les dangers qui peuvent résulter du stockage en cavités salines sont à prendre très au sérieux dès la conception d’un tel projet : L’entreprise-propriétaire du très grand champ de cavités salines à Etzel vient d’avouer que selon une étude toute récente le terrain va s’affaisser de 2,30m d’ici 2060 , et ceci pour des cavités qui sont encore en exploitation!

Concernant donc l’abondon des cavités, nous trouvons dans les extraits plus bas et notamment dans l’étude complète d’INERIS :

« Deux types d’aléas peuvent potentiellement résider à long terme après l’abandon d’une cavité (ou d’un réseau de cavités) de stockage dans le sel : 

(1) des mouvements de la surface du sol, soit sous forme d’affaissement souple soit, dans le cas extrême, sous forme d’effondrement brutal ;

(2) une pollution des eaux souterraines ou superficielles par la saumure. »

Voici les citations et extraits de l’étude  d’INERIS:

« Le stockage de gaz naturel ou d’hydrocarbures en cavités creusées par dissolution dans le sel est un procédé relativement récent. En effet, le plus ancien stockage de ce type en France a été mis en exploitation il y a moins de 50 ans. »

« La méthode classique: mettre la cavité en saumure et à obturer définitivement le puits par remplissage (partiel ou total) de ciment. »

 » 4.2 LES PHENOMENES QUI GOUVERNENT L’EVOLUTION DE LA CAVITE  
L’évolution d’une cavité abandonnée dans le sel est gouvernée principalement par cinq phénomènes :

1. le réchauffement de la saumure : la saumure injectée dans la cavité est généralement à la température de la surface (autour de12°C en moyenne annuelle). Sa mise en contact avec le massif de sel beaucoup plus chaud entre 20-60°C selon la profondeur de la cavité) va donc générer un phénomène de dilatation thermique qui va se traduire, selon que la cavité est ouverte ou fermée, par un débit de saumure sortant du puits (dans le premier cas) ou par une augmentation de la pression dans la cavité (dans le deuxième cas) ;

2. la convergence de la cavité par fluage du sel : le sel gemme est une roche viscoplastique à seuil de contrainte déviatorique nul : soumis à la moindre contrainte déviatorique, le sel se déforme (« flue » ou « s’écoule »). Ainsi, la moindre différence de pression entre la cavité et le massif environnant va entraîner une déformation de la cavité par fluage du sel, qui va prendre la forme d’une convergence (la pression interne étant en principe inférieure à la pression des terrains) ;

3. la perméation de la saumure à travers le massif de sel : bien que très faible (typiquement entre 10-17 et 10-21m2), la perméabilité du massif sel n’est pas nulle, ce qui permet une migration très lente de la saumure vers l’extérieur de la cavité. Cette perméation tend à contrarier l’augmentation de pression liée au fluage du sel et au réchauffement de la saumure ;

4. la fuite de saumure par l’intermédiaire du puits : un bouchon de ciment, quelle que soit sa qualité, ne peut garantir une étanchéité parfaite. Par ailleurs, à très long terme, le vieillissement du ciment peut mener à ce que des fuites de saumure apparaissent à l’interface entre le ciment et le terrain ou à travers le ciment lui-même. Ces fuites vont contribuer, comme la perméation à travers le sel, à réduire la pression en cavité ;

5. la dissolution complémentaire du sel par la saumure : il se peut que la saumure introduite dans la cavité ne soit pas totalement saturée en sel, donc si  un temps suffisant n’est pas respecté entre la mise en saumure et la fermeture de la cavité, la dissolution du sel peut se poursuivre après la fermeture de la cavité. D’autre part, la saturation de la saumure augmentant avec la pression et la température, l’évolution de ces deux paramètres après fermeture de la cavité va entraîner une dissolution complémentaire du sel. Toutefois, ce phénomène peut généralement être considéré comme du deuxième ordre comparé aux autres phénomènes.«  (page 34)

« Dans ces conditions, le réchauffement de la saumure au contact du massif va générer un phénomène de dilatation thermique qui, en cavité fermée, va provoquer une augmentation de pression. Si cette augmentation de pression n’est pas maîtrisée, on peut craindre un dépassement de la pression lithostatique  et de ce fait, une rupture de la cavité ou des cimentations du puits par fracturation hydraulique. 

Pour éviter cette situation, la solution la plus simple consiste à d’attendre que la saumure se réchauffe avant de fermer définitivement la cavité, soit en laissant le puits ouvert soit en purgeant régulièrement la cavité sur dépassement d’un seuil de pression. Le problème est que la cinétique de ce réchauffement peut être lente. » [...]

« … on peut estimer globalement qu’une cavité mise en saumure à une température de 12°C va mettre une dizaine d’années pour atteindre l’équilibre thermique si la cavité est petite (15 000 m3), une cinquantaine d’années si elle est moyenne (150 000 m3) et une centaine d’années si elle est grande (500 000 m3). » (page 35)

« Une fois passée la période initiale de réchauffement de la saumure, la cavité sera gouvernée essentiellement par deux phénomènes : le fluage du sel, qui engendre une convergence des parois de la cavité et qui tend par conséquent à faire augmenter la pression en cavité, et la perméation de la saumure à travers le massif de sel (ainsi que le long du puits), qui tend au contraire à relaxer la pression en cavité. La pression va donc s’installer, à terme, sur une valeur d’équilibre où le débit de saumure sortant de la cavité équivaut exactement à la perte de volume liée à la convergence de la cavité. » (page 40)

« Néanmoins, il est important de noter que ces calculs de fluage ne tiennent pas compte de l’endommagement autour de la cavité (ruptures de bancs, chutes de toit) qui tend à en accélérer la fermeture. C’est le cas de certaines cavités salines qui ont conduit à une  convergence rapide et inattendue (Tersanne, Eminence, Twenthe-Rijn, Heiligrelee brine field). A Tersanne (France), une perte de volume de 30% a été constatée en 10 ans, conduisant à un affaissement pluricentimétrique en surface [Durup, 1991]. A Eminence (EU), la cavité a perdu 40% de sa capacité de stockage dans les deux années qui ont suivi sa mise en service. » (page 42)

« [...] il est également intéressant, de déterminer le débit de saumure qui va migrer hors de la cavité.[...] Les estimations réalisées dans le cadre de cette étude  aboutissent à des débits compris entre quelques litres/an (pour des cavités peu profondes, avec un sel peu fluant et peu perméable) et quelques centaines de m3/an (dans le cas inverse). » (page 42)

« Il revient donc à l’exploitant, dans le contexte propre du site, de bien évaluer l’importance de l’ensemble de ces rejets et l’impact qu’ils pourraient avoir sur la qualité des eaux environnantes. » (page 42)

« La convergence d’une cavité par fluage du sel est un phénomène normal et attendu dans l’évolution d’une cavité saline après son abandon.

[...] on peut s’attendre à ce que cette perte de volume se répercute au moins partiellement en surface. [...] on peut l’estimer en général d’ordre métrique. Dans la plupart des cas, cet affaissement [...] sera imperceptible à l’échelle humaine. [...] Néanmoins [...] le retour d’expérience des affaissements qui ont eu lieu suite à la convergence rapide et inattendue de certaines cavités dans le sel, qu’il s’agisse de cavités de stockage (Tersanne, Eminence) ou de cavités d’exploitation du sel (Twenthe-Rijn, Heiligrelee brinefield) montre que dans certains contextes, une vitesse d’affaissement de l’ordre du cm/an n’est pas à exclure. [...] un tel affaissement [...] pourrait avoir des impacts sur les infrastructures (bâtis) ou sur l’environnement (perturbation du système hydrographique, inondations, etc.). » (page 51)

Autres risques listés dans l’étude: 

«  La rupture des parois d’une cavité saline [...] 

[...] rupture localisée du toit et enfin rupture généralisée, c’est-à-dire l’écroulement de la cavité.

[...] conséquences importantes, que ce soit en terme de mouvements de la surface du sol ou en terme de pollution des eaux souterraines par la saumure.

[...] les conséquences en surface peuvent être de deux types : un affaissement souple de la surface du sol (cuvette d’affaissement) ou un effondrement brutal (formation d’un cratère)

 [...] une rupture généralisée de la cavité pourrait avoir pour conséquence de mettre la cavité en communication directe avec une formation aquifère poreuse et perméable. La saumure irait ainsi polluer la nappe aquifère et/ou l’eau de l’aquifère envahirait la cavité, se chargeant en sel (second facteur de pollution) et risquant d’aggraver l’instabilité mécanique en défruitant le massif de sel. » (page 51)

- « La pollution des eaux souterraines par la saumure injectée dans la cavité au moment de l’abandon est un aléa à ne pas négliger [...]. » (page 54)

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L’étude complète de l’INERIS:

Michaela Neuhaus – Messanges le 11 février 2012 : 

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