Débat Public sur le
PROJET DE STOCKAGE SOUTERRAIN
DE GAZ NATUREL
SALINS DES LANDES
Cahier d’acteur
Fédération SEPANSO Aquitaine
Déclarée d’utilité publique et affiliée à France Nature Environnement ainsi qu’au Bureau Européen de l’Environnement, la SEPANSO Aquitaine est une fédération régionale d’associations de protection de la nature. Généraliste, elle suit l’évolution des milieux naturels en Aquitaine, elle étudie les risques et évalue les conséquences des activités humaines sur l’environnement de la région. Elle s’est impliquée dans la plupart des débats concernant les projets énergétiques de notre région (terminal méthanier du Verdon, centrales photovoltaïques, captage et stockage du CO2, énergie nucléaire), et est membre du comité de pilotage du Schéma régional Climat Air Energie.
C’est à ce titre qu’elle est fondée à émettre un avis sur le projet de stockage souterrain de gaz naturel de Salins des Landes.
Un projet inopportun
Le changement climatique, qui touche particulièrement l’Aquitaine, constitue un des problèmes écologiques majeurs, auquel l’ensemble de la collectivité se doit d’apporter des réponses urgentes et adéquates, hors des intérêts particuliers.
Avec des émissions annuelles de l’ordre de 25 millions téq CO2, depuis 1990, alors que la moyenne française est en baisse, la Région Aquitaine se doit de relever le défi climatique.
C’est le sens d’une démarche que nous soutenons fortement, et qui vise, dans le cadre du Schéma Climat Air Energie (SRCAE) en cours de finalisation, à réduire les émissions régionales de GES de 20 à 30% d’ici 2020 et 75 d’ici 2050.
Or, le projet de création de site de stockage de gaz, qui répond exclusivement à la rationalité interne de l’entreprise EDF, de développer son « business » dans le gaz naturel, favoriserait inévitablement de nouvelles émissions de CO2, contredisant les objectifs d’atténuation des émissions de GES, visés par la Région.
La SEPANSO conteste donc l’opportunité de ce projet, incompatible à ses yeux, avec les objectifs régionaux et nationaux de lutte contre l’effet de serre.
Trop de questions sans réponse
De la projection de l’entreprise dans le temps se dégagent deux usages : le stockage/soutirage de gaz en Chalosse et la construction de canalisations (les saumoducs) qui chemineront jusqu’à l’océan pour y puiser de l’eau et y rejeter de la saumure. Si le premier usage est appelé à se prolonger dans le temps, il est exposé clairement que le second est temporaire, lié au creusement des cavités de stockage. Pourtant, en aucun cas le démantèlement des canalisations n’est envisagé. Sur quels critères laisser ad aeternam ces canalisations ? C’est tout de même au maître d’oeuvre de faire la démonstration de la pertinence de ses choix, il ne le fait pas, il décrète !
Mais le pire est probablement au coeur du projet :
— Pourquoi la structure géologique est-elle présentée de manière aussi simpliste (dôme de sel) alors que les études géologiques existantes montrent sa complexité (hétérogénéité des formations géologiques, présence de failles, etc.) ?
— Pourquoi les résultats du puits SDL 1, relativement défavorables, à savoir : continuité latérale des bancs hautement improbable, compte tenu des valeurs de pendage observées (supérieures à 70 %), teneurs en minéraux insolubles relativement élevées, de l’ordre de 30 %, en dessous de 500 m, passées d’insolubles massifs, de dolomie et calcaire, d’argile massive et d’anhydrite, sans certitude sur la possibilité de lessivage, ne sont-ils pas présentés dans le dossier du maître d’ouvrage pour le débat public ?
— Aussi, on se doit de noter, — concernant les résultats du forage d’exploration SDL 1, et alors que les informations n’ont qu’une valeur locale qui ne permet pas de se prononcer sur l’extension latérale des formations rencontrées, — la différence d’appréciation qui existe entre le dossier du maître d’ouvrage pour le débat public, d’octobre 2011, qui indique page 42 que « Les résultats ont confirmé la faisabilité du projet avec une hauteur importante de sel compatible avec la création des cavités.» et le rapport de fin de sondage et de fermeture définitive du puits SDL 1 (rapport EDF d’octobre 2010) qui indique dans sa conclusion, page 50 que « les informations obtenues sur le diapir sont de nature à permettre la poursuite des investigations de la structure, dans le but d’étudier l’implantation possible d’un stockage souterrain de gaz naturel en cavités salines ». Affirmation dans un cas, nécessité de poursuivre les investigations dans l’autre.
Pourquoi est-il demandé aux citoyens de donner un avis sur un projet, sans que les études techniques (en particulier la réalisation d’un deuxième forage, prévu début 2012) ne soient réalisées et donc mises à disposition du public ? Pourquoi le débat public a-t-il démarré, en l’absence de certitudes sur la faisabilité technique du projet ?
Un projet anti-écologique :
Le projet nécessiterait des consommations d’énergie considérables pour réaliser une cavité utile sur une période limitée. La sécurité n’est pas assurée en raison des risques sismiques… Le projet risque de nuire à l’image « Nature » de la côte landaise et de porter préjudice aux acteurs du tourisme. La construction des saumoducs porterait des atteintes considérables à l’environnement. Enfin concernant le milieu marin, nous avons de réelles inquiétudes sur l’impact des rejets de saumure (il ne s’agit pas de 100% de chlorure de sodium et nous n’avons pas de données précises sur la composition des rejets envisagés) dans l’océan sur les populations benthiques. En effet, un rejet de 1000 m3/h de saumure à 250g/l ne pourrait qu’avoir un impact négatif considérable (anoxie du fond marin) sur plusieurs km2. En cas de mer agitée, c’est toute la colonne d’eau qui serait impactée.
Ceci irait à l’encontre de la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » (2008/56/CE) qui demande impérativement le maintien du bon état écologique des fonds marins de la façade maritime. C’est un motif supplémentaire de refus de ce projet
Au final, outre l’environnement marin et terrestre, nous estimons que ce projet dégraderait considérablement l’image du maître d’oeuvre EDF, que l’entreprise essaie pourtant de « verdir », au travers ses investissements dans les énergies renouvelables, et notamment photovoltaïques.
Comment EDF utilisera-t-elle les données du débat public ?
D’après la Loi Barnier, le Débat Public porte d’abord sur la nécessité ou non de réaliser le « projet » d’un maître d’ouvrage. Au fil du temps nous avons assisté à un débat en trompe l’oeil souvent biaisé selon une stratégie savamment orchestrée. Pourquoi s’en étonner ? La loi Barnier et le débat public présentent une faille déjà patente puisqu’ils n’obligent pas le maitre d’ouvrage à tenir compte de l’expression de l’opinion publique.
Dans cette situation de débat public chacun — maitre d’oeuvre, citoyens — a pu exercer son pouvoir, le pouvoir de s’exprimer. Remarquablement bien organisé, argumenté et géré par le maitre d’oeuvre, beaucoup plus spontané pour les citoyens qui bien souvent n’ont que leurs cris pour exprimer leur désaccord. Maintenant de deux choses l’une, ou bien le maître d’ouvrage entend les arguments qui lui sont opposés et il renonce, ou bien il associe la puissance à son pouvoir qui devient alors coercitif : c’est l’imparable déclaration d’utilité publique.
La Convention d’Aarhus doit permettre de dégager la ligne de force des volontés des populations locales. Est-ce qu’EDF acceptera d’écouter les citoyens ?
Conclusion :
Dans ce monde d’incertitudes, ce Débat Public semble, de fait, un outil qui vise, au prétexte d’une « démocratie technique », à imposer l’acceptabilité du retour aux énergies fossiles selon des solutions technologiques, au mépris des risques inhérents de catastrophes prévisibles de destructions irréversibles d’habitats et d’espèces, accélérateurs du déclin de la biodiversité.
Pour toutes les raisons déjà connues et recensées ainsi que pour les motifs ayant trait à la politique énergétique de la France et à ses modalités d’action pour la maîtrise de ses rejets de gaz à effet de serre, la SEPANSO – s’oppose de la façon catégorique au projet de stockage souterrain de gaz naturel Salins des Landes.
Courant de Huchet – marais de la Pipe
L’originale du Cahier à télécharger
Fédération des Sociétés pour l’Etude, la Protection et l’Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest
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