Cahier d’acteur : Groupe des Élu/es Europe Écologie/Les Verts du Conseil Régional d’Aquitaine

Le groupe des élu/es Europe Écologie-Les Verts est l’un des 5 groupes politiques du Conseil régional d’Aquitaine.
Il est composé de 10 conseillers régionaux et présidé par Monique De Marco.

Contact : 14, rue Franćois de Sourdis – 33077  BORDEAUX CEDEX  - groupe.verts@verts.aquitaine.fr

Un projet dont la logique date du siècle dernier !

Le projet d’EDF de stockage souterrain de gaz naturel de Salins des Landes est, de par sa nature même, l’archétype d’une politique énergétique basée prioritairement sur l’offre en matière d’infrastructures de production et de stockage. Une telle politique du XX° siècle a été imposée de longue date au détriment d’une politique de maîtrise de la demande d’énergie. Les chocs pétroliers successifs depuis 1993 n’ont pas réussi à détrôner cette politique de l’offre malgré ses conséquences néfastes en matière d’impacts environne-mentaux, sanitaires mais aussi sociaux et financiers. Pire, en France, ces chocs pétroliers ont favorisé la création d’un parc centralisé et surdimensionné de réacteurs nucléaires, fleuron d’EDF. Aussi, il est édifiant que dans le dossier du débat public, la problématique de la production nucléaire française soit à peine effleurée comme si EDF voulait faire oublier les inconvénients très importants de cette production hypercentralisée et surdimensionnée. Mais le plus édifiant, c’est qu’EDF justifie l’opportunité de son projet par la nécessité d’accompagner le développement des énergies renouvelables, en développant une capacité de production à partir de centrales au gaz à cycle combiné, pouvant pallier ainsi l’intermittence de ces énergies renouvelables. Loin de critiquer son appareil de production nucléaire et centralisé qui se montre incapable de gérer cette intermittence (mais aussi de manière tout aussi flagrante de gérer les pointes de consommation), EDF prend les énergies renouvelables en quelque sorte comme boucs émissaires afin de légitimer son choix de réaliser ce projet.

Il est remarquable d’ailleurs que le sujet de l’intermittence serve à la fois, d’un côté, le camp des défenseurs du nucléaire et de l’autre celui des opposants au développement des énergies renouvelables notamment de l’énergie éolienne, opposants qui s’octroient abusivement la qualité de défenseurs de l’environnement. Dans le premier camp, l’idée maîtresse qui est avancée est celle que le nucléaire est incontournable si on ne veut pas revenir à la bougie ; les énergies renouvelables étant incapables selon eux d’assurer une production électrique permanente et au même niveau de puissance. Dans l’autre camp, on accuse l’intermittence des énergies renouvelables d’être responsable indirectement d’émissions de gaz à effet de serre beaucoup plus importantes que celles qu’est censé éviter le recours à ces énergies. En effet, ces opposants prétendent qu’à chaque capacité supplémentaire de production éolienne ou photovoltaïque créée, une capacité de production à base d’énergie fossile (gaz, charbon, fuel) doit être mobilisée en parallèle pour pallier le manque de vent et/ou d’ensoleillement.

En réalité ces deux camps n’en font qu’un. L’intermittence n’est qu’un prétexte pour défendre des choix énergétiques surannés totalement inadaptés aux défis à relever du changement climatique et de la raréfaction des ressources naturelles. L’éolien ou le photovoltaïque ne sont pas en réalité des productions intermittentes, ce sont des productions variables mais prévisibles avec une bonne visibilité et dont la répartition sur tout le territoire permet d’augmenter considérablement la fiabilité par foisonnement géographique des sources de production. La gestion de cette variabilité des énergies renouvelables n’est pas un problème en soi dans un système de production décentralisé et diversifié au niveau des sources d’énergies renouvelables, en conjugaison avec l’utilisation de technologies matures comme la méthanation(1). Le principe en est assez simple : lors des creux de consommation d’électricité, l’électricité produite excédentaire est utilisée pour fabriquer de l’hydrogène par électrolyse. Cet hydrogène est ensuite combiné avec du CO2 afin d’obtenir du méthane de synthèse que l’on pourra injecter directement dans le réseau de distribution de gaz.

Dans le cadre d’un système énergétique de production décentralisé et basé principalement sur les énergies renouvelables tel que l’envisage le scénario NégaWatt(2), la variabilité de ces dernières est donc quasiment compensée par la mise en oeuvre de cette technologie qui, de plus substitue au gaz naturel fossile du méthane de synthèse issu de renouvelables. Le réseau de gaz devient ainsi un gigantesque stockage de gaz issu des énergies renouvelables diminuant ainsi de manière très importante les importations de gaz naturel, voire à terme en s’y substituant totalement. Sur le long terme, il n’y a donc nul besoin de créer des stockages de gaz naturel comme celui de Salins des Landes qui ne font qu’accroître encore davantage la dépendance énergétique de la France.

1 : http://www.negawatt.org/reseaux-electricite-gaz-p94.html#R7
2 : http://www.negawatt.org/scenario-negawatt-2011-p46.html

Un projet incompatible avec le projet de Schéma Régional Climat Air Énergie

Le projet de Schéma Régional Climat Air Énergie (SRCAE) pour l’Aquitaine est en cours d’élaboration et de consultation sous la responsabilité de la région Aquitaine et de l’État. Le groupe des élu/es Europe Écologie-Les Verts oeuvre afin que ce SRCAE se donne pour objectif à l’horizon 2020, un scénario dit « Durban » du 3×30 : 30 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre, 30 % d’efficacité énergétique et 30 % d’énergies renouvel-ables. De plus, la région vient d’adopter deux plans pour décliner ces objectifs au niveau régional : le plan Défi Aquitaine Climat et le plan Aquitaine Énergie positive.

Le projet d’EDF apparaît être en totale contradiction avec ces initiatives car l’utilisation du gaz naturel stocké à Salins des Landes contribuerait à compromettre les efforts consentis pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs d’activités aquitains. Et cela est d’autant plus vrai en matière de transports ferroviaires, domaine dans lequel on nous vante les mérites des Lignes à Grande Vitesse du GPSO en terme d’alternatives à la route, et donc de réduction des GES, alors que ces LGV seraient alimentées par l’électricité produite par des centrales dont le combustible gaz serait issu de ce stockage de Salins des Landes. De qui se moque-t-on ?

crédit photo : ©Stéphane Scotto

Un projet dont la note serait « salée » en termes d’impacts écologiques

L’addiction de notre société à l’énergie est telle que tous les moyens techniques possibles et imaginables sont utilisés ou seront utilisés pour satisfaire son appétit insatiable. Le pétrole, le gaz, le charbon et l’uranium seront extraits jusqu’au dernier litre et au dernier gramme et ce quels que soient les dégâts environnementaux et sociaux occasionnés. Les exemples abondent, de l’exploitation de forages pétroliers en Alaska à l’exploitation de gaz de schiste ou du trésor enfoui que constituent les hydrates de méthane sur lesquels lorgnent déjà d’avides spéculateurs. A l’évidence, le projet de Salins des Landes n’échappe pas à cette règle.

Le contexte géologique du site retenu n’apparaît pas favorable malgré la présentation avantageuse d’EDF qui occulte un rapport du BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) montrant la complexité et l’hétérogénéité du sous-sol. Beaucoup d’incertitudes demeurent ainsi quant à l’innocuité dans le temps de ce stockage de 600 millions de m3 de gaz et les propos lénifiants d’EDF inquiètent plutôt qu’ils ne rassurent. Les travaux de réalisation des cavités dans les massifs de sel nécessiteraient une saignée très destructrice pour les milieux naturels par la construction d’un saumoduc. Celui-ci serait constitué de deux canalisations enterrées, une pour transférer de l’eau puisée dans l’océan afin de dissoudre le sel, l’autre pour rejeter cette eau saturée dans ce même océan. Les rejets en mer de ce saumoduc porteraient une atteinte inacceptable aux milieux marins du littoral avec le déversement de quantités importantes de saumure. EDF est incapable de fournir la composition de cette saumure et les impacts négatifs engendrés, attitude qui est contraire au principe de précaution.

CONCLUSION

Le projet soumis au débat public ne répond qu’aux intérêts stratégiques et financiers d’EDF et en aucune faćon à l’intérêt général et au bien commun. Les urgences climatiques, écologiques mais aussi économiques, financières, sociales et territoriales réclament un changement radical de paradigme. Il faut passer du modèle actuel dominant et mortifère du « MégaWatt » symbolisé par le projet de Salins des Landes à celui innovant et vertueux du « NégaWatt » car notre société peut subvenir parfaitement à ses besoins en diminuant considérablement l’utilisation d’énergies fossiles et nucléaire.

La démarche NégaWatt repose sur le triptyque : sobriété, effcacité énergétique et recours massif aux énergies renouvelables de manière diversi!ée, décentralisée et territorialisée. Le scénario NégaWatt 2011 présenté récemment démontre qu’avec la synergie d’action des trois grands principes du triptyque une transition énergétique progressive est possible, capable de limiter considérablement les émissions de gaz à effet de serre et de respecter ainsi les engagements internationaux de la France, tout en assurant les besoins énergétiques de tous de manière optimale et en créant de nombreux emplois locaux.

Le projet d’EDF est aux antipodes de cette démarche et de ces perspectives. Il ne peut donc que susciter notre opposition unanime et déterminée, à l’instar de celle d’une forte majorité de citoyens, associations et élus locaux.

 

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